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Le grenier

 

LE GRENIER

 

 

   Le grenier est la pièce de la maison où nous entreposons toutes sortes d’objets hétéroclites : ustensiles obsolètes,  vêtements démodés, bibelots de haute valeur sentimentale ; meubles anciens et autres objets hérités de la famille ; vieux livres dont on ne veut pas se débarrasser, mais trop nombreux pour notre bibliothèque déjà archi pleine, jouets et vêtements de bébé devenu grand, en vue d’un éventuel futur petit frère…

 

   Le grenier n’est pas une pièce qui vit. C’est une chambre morte, où nous entreposons des objets qui ont vécu, mais dont, pour une raison ou pour une autre, nous n’avons plus l’utilité. Nous ne le visitons que très rarement, car il ne contient que des objets appartenant au passé. Nous pouvons avoir l’impression que cette pièce sombre et poussiéreuse ne sert pas à grand-chose. Chaque fois que nous y venons pour ajouter un objet à la pile, laquelle finit par atteindre le plafond et semble vouloir repousser les murs, nous nous disons : « finalement, est-ce que je ne ferais pas mieux de jeter carrément à la poubelle tout ce qu’il y a là-dedans, ou de le donner à quelque association pour qu’elle en fasse ce qu’elle voudra bien en faire ? Puisque je ne m’en sers pas, que je n’y pense même plus, à quoi me sert de l’entreposer ? » Puis, notre regard tombe « par hasard » sur quelque chose que nous ne cherchions pas, dont nous avons même oublié l’existence, et alors des souvenirs refont surface. Étrangement, l’objet en apparence inerte et recouvert de poussière dans cette pièce dite morte, reprend immédiatement vie avec notre émotion de la voir.

 

   Ainsi, imaginons un homme qui vient d’avoir une grosse dispute avec sa conjointe. La querelle a été si intense et a entraîné des mots si durs qu’il se met à penser qu’en réalité sa compagne ne l’a jamais aimé. Très en colère et démoralisé, il se dit que la situation est devenue intenable et qu’il ferait bien mieux de divorcer. Peut-être même que cette pensée l’a déjà effleuré plusieurs fois auparavant, et n’a fait que grandir en lui au fil du temps. Ce jour-là, cet homme a besoin d’évacuer son stress et d’extérioriser son agressivité à travers le bricolage. C’est sa manière à lui de se calmer. Malheureusement, l’outil dont il a besoin pour ce faire vient de lui claquer dans les mains à cause de sa maladresse et de la manière abrupte dont il s’en est servi avec rage. Mais il veut à tout prix finir ce qu’il a commencé. Il se souvient d’avoir remisé un jour au grenier un vieil outil un peu rouillé, après l’avoir remplacé par le neuf, à présent inutilisable, en se disant qu’il pourrait peut-être en avoir besoin un jour. Il ne croit pas si bien dire… Il monte donc au grenier pour le récupérer. Arrivé dans le sombre débarras plein de poussière, il se met à chercher frénétiquement parmi les cartons et les caisses, les sachets plastiques… Pas moyen de retrouver l’outil en question. Puis, tout à coup, son œil est attiré par un éclat de lumière. L’objet paraît presque faire exprès de scintiller pour attirer son regard, un peu comme s’il lui faisait un clin d’œil. Il se penche un peu plus et là, tombe nez à nez, non pas avec l’outil recherché, mais avec un objet décoratif remisé là cinq ans auparavant, après changement complet du design de son bureau. Son épouse le lui avait offert par amour. C’était un bibelot précieux, très coûteux, pour lequel elle avait économisé en cachette pendant des mois, parce qu’elle savait que ce cadeau lui ferait plaisir. Quand il lui avait dit, émerveillé : « tu es folle, ma chérie, ça a dû te coûter les yeux de la tête ! » Elle avait répondu simplement avec un regard plein d’amour qu’il n’oublierait jamais – du moins était-ce ce qu’il avait pensé sur le moment – : « tu en rêvais, et je t’aime plus que tout, alors voilà. »

Si notre homme avait besoin d’une confirmation du fait que sa compagne l’avait vraiment aimé, et qu’elle l’aimait peut-être encore, son grenier empoussiéré réputé sans vie vient de la lui offrir en ce jour de questionnement existentiel majeur. Cette visite inattendue aura forcément modifié sa façon de voir les choses, et aura sans doute conduit notre homme à revoir ses intentions.

 

   À travers cet exemple, on se rend bien compte qu’en réalité, le grenier n’est pas une pièce morte, contrairement aux apparences, mais qu’au contraire, sous la poussière que nous y avons laissé s’accumuler, elle bouillonne encore des souvenirs de notre vie passée.

  J’aime à penser que notre inconscient est un peu le grenier de notre être. En cet endroit sont entreposés toutes nos expériences et souvenirs du passé, que nous avons enfouis plus ou moins profondément, consciemment ou inconsciemment. C’est une caverne d’Ali-baba pour les voleurs de notre âme que sont nos petites habitudes sécurisantes, nos faux-semblants, nos réflexes orgueilleux, nos souvenirs pesants. Ouvrir la porte de ce grenier, c’est à coup sûr trouver les clés des mystères qui nous barrent le chemin que nous avons choisi de parcourir, ou qui pourraient, au contraire nous aider à changer de route.

 

   Le fait est que nos problèmes et nos limites actuels trouvent bien souvent leur source dans nos souvenirs d’enfance ou ceux d’un passé plus ou moins rapproché. Ils sont ces antagonismes, ces rivalités avec les autres, non encore digérés, ces problèmes non encore résolus, qui nous maintiennent en conflit avec nous-mêmes. Tant que nous ne décidons pas de régler ces différends une fois pour toutes, d’abord en admettant leur existence et le rôle qu’ils ont joué et jouent encore dans notre vie, ensuite en les accueillant, aussi dérangeants qu’ils puissent être, en les conscientisant, puis en les verbalisant, nous restons en opposition avec nous-mêmes. De fait, il nous est impossible d’avancer. Nous les cristallisons davantage, ces faits refoulés, et ce faisant, nous leur octroyons même une certaine forme de légitimité. En conséquence de quoi nous perpétuons par ailleurs nos mauvaises habitudes du passé, nous tolérons et laissons perdurer nos relations toxiques, en étant pourtant parfaitement conscients qu’elles le sont. Ceci crée obligatoirement en nous un hiatus discordant qui au mieux nous déstabilise, la plupart du temps nous fragilise, ou dans le pire des cas nous détruit à petit feu. 

 

   Notre inconscient, cette autre réalité qui nous transcende, sorte de supra-conscience qu’est le grenier de notre être, est le siège de notre âme, elle-même en osmose avec l’univers. Celui-ci nous envoie constamment des signes pour nous guider sur la voie de la libération, à travers la conscientisation de ces éléments du passé qui interagissent encore dans notre présent. Si notre troisième œil est ouvert, c’est que nous avons acquis une capacité suffisante de discernement, voire de clairvoyance pour les reconnaitre instantanément et en tirer immédiatement les conclusions qui s’imposent. Ainsi que nous l’avons vu précédemment, ceci ne peut se faire que si auparavant et de manière concomitante, nous avons pris et gardons l’habitude d’exprimer clairement nos émotions, autant que nos intentions.

 

   Ainsi que l’a largement développé Carl Gustav Jung, le célèbre psychiatre qui en créa le concept, en parallèle de notre inconscient individuel existe aussi un inconscient collectif. Selon la psychologie analytique, l’inconscient collectif désigne l’ensemble des comportements humains liés à l’imaginaire à travers toutes les époques et en tous lieux. Il s’agit d’une sorte de grand réservoir universel contenant nos instincts et nos émotions, et tenant à notre disposition différents archétypes et symboles pouvant nous aider à nous définir et à évoluer dans le monde, vers le meilleur de nous-mêmes. C’est une sorte d’univers parallèle au nôtre, que ne perçoit pas notre raison consciente, mais que, de temps à autre, il nous arrive d’effleurer, grâce aux signes et aux symboles que nous envoie l’univers, parfois à travers nos rêves.

 

   Je voie un peu cet « inconscient collectif » de Jung, autrement nommé Conscience Supérieure par d’autres, comme le toit d’une maison. Celui-ci est à la fois intérieur et extérieur à la bâtisse de par sa fonction même, qui est de protéger tout ce qui se trouve au-dessous de lui. Le revêtement dont il est constitué sert à préserver la maison des éléments extérieurs que sont le vent, la pluie, le froid, le chaud, mais aussi des diverses nuisances extérieures, humaines ou animales. Le toit garantit sécurité et bien-être aux habitants de la maison.

 

   Ainsi, notre inconscient individuel, ce toit solide de notre maison physique, tourné vers et assisté de l’inconscient collectif chargé de symboles serait là pour nous fournir les éléments indispensables à la bonne protection de notre psyché, et par voie de conséquence de notre corps physique.   

 

  Je pense que la voie de l’équilibre à travers l’alignement de notre être sur l’extraordinaire clairvoyance de notre âme, se fait à partir de deux éléments fondamentaux : la verbalisation de nos ressentis et la reconnaissance des signes que l’univers nous envoie régulièrement sur le chemin de notre évolution personnelle. Je crois indispensable de ne jamais perdre de vue l’idée que nous sommes en permanence reliés à l’univers, en osmose avec le Grand Tout. Même si la plupart du temps nous n’en sommes pas conscients, notre âme l’est, quant à elle. Notre âme est notre supra-conscience, notre « Anima » ainsi que la nommait Jung. Ce que sait notre âme est la même chose que ce que sait l’univers.

 

   Nous sommes bien plus notre âme que notre corps, même si nous l’avons oublié depuis bien longtemps. Notre corps n’est que le véhicule physique de notre être, lequel est Divin et supra-conscient. Nous sommes à la fois la source et l’émetteur de l’énergie cosmique qui préside à toute vie dans l’univers. Dès lors, nous sommes à la fois notre propre gardien et notre éveilleur. Nous sommes le socle, la charpente, les pièces à vivre, le grenier, le toit, mais aussi le ciel au-dessus du toit. C’est le fait de se le rappeler, de le conscientiser et de le vivre qui nous donne accès à la Connaissance Supérieure, laquelle nous offre le savoir universel, en nous donnant le pouvoir de compréhension des mystères de l’univers encore non révélés.

 

 

 



04/02/2023
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